Une femme d’affaires à l’affût des possibles
D’emblée, on remarque que les yeux de Jasmine Bélanger ne voient pas comme on le fait d’ordinaire.
En fait, ses yeux ne semblent pas regarder l’environnement ; ils l’absorbent. Ils ne balaient pas le paysage en surface ; ils le scrutent en profondeur. Ils ne se posent pas sur les choses ; ils cherchent toujours au-delà de leur simple image. Jasmine Bélanger porte cette curiosité vorace dans les yeux. On les sent prêts à déchiffrer les humains et les étoiles avec une même passion, comme des sources inépuisables d’inspiration. Devant une pousse, elle contemple déjà l’arbre futur. À travers une goutte d’eau, elle discerne ce qui compose la rivière. Partout, Jasmine Bélanger imagine le potentiel et les motivations, ces étincelles de possibilités en chacun de nous.
Avec ses qualités développées durant son cheminement, Jasmine affirme sa mission : « aider le plus de monde possible à mieux se connaître ». Pour l’entrepreneure émérite derrière Nova Global, « tout le monde a du génie, il suffit de trouver dans quoi et comment le développer ».
Tirailler entre un goût pour la pensée et un amour du pratique
C’est dire que Jasmine voit la complexité derrière le réel. Ce réel et son immensité l’ont d’ailleurs toujours fasciné depuis son enfance passée entre les paysages montagneux de la Suisse et ceux fluviaux du Québec, ces deux contrées dont elle est issue. De nature rêveuse « héritée de sa mère », la petite Jasmine lit continuellement. Elle adore provoquer et élaborer sa pensée au fil d’ouvrages sur la psychologie et la philosophie. Le soir tombé, allongé sur l’herbe, le roc ou le béton, elle examine le ciel en quête de réponse. L’inconnu, en général, constitue une bougie d’allumage en ce qui la concerne. Elle grandit avec ce désir de comprendre. Dès ses 16 ans, elle rejoint donc les bancs de classes dédiées à ses domaines de prédilections, cette psychologie et cette philosophie si chères à son cœur. Elle poursuit ses études à l’université jusqu’à ses vingt ans. Néanmoins, peu à peu, un sentiment d’ennui l’envahit.
Au cours d’une lecture particulièrement déterminante, l’Alchimiste de Paulo Coelho, Jasmine apprend deux leçons existentielles cruciales : « la vie place sur notre chemin des indices » et « le trésor de notre être est en nous ». Ces deux révélations phares la mènent à se questionner sur sa place dans le milieu académique et sur ses choix. Jasmine se décrit volontiers comme « une personne dont la confiance repose sur son intuition ». Elle éprouve un besoin de se jeter dans l’action avec ses connaissances et de ne pas rester exclusivement intellectuelle dans son approche. À l’instar d’une majorité d’entrepreneurs, elle dit « mieux apprendre » de cette façon. Un côté concret lui manque dans la simple érudition. Cette lassitude s’avère un indice, il lui faut trouver une autre voie. Elle qualifie cet instant de « crise existentielle ».
Comment réconcilier ses intérêts pour la philosophie, la psychologie et l’entrepreneuriat ?
À cette époque, dans le souci de progresser avec plus d’acuité, Jasmine demande à son père de lui venir en aide. Ce dernier, Guy Bélanger, joue bien sûr son rôle de père auprès d’elle, mais dès ce moment, il revêt aussi celui de coach professionnel. Dans l’objectif de lui fournir les moyens de se connaître avec plus de profondeur, Guy met ce que Jasmine surnomme affectueusement son « deuxième chapeau ». Ex-entrepreneur lui-même dans d’autres domaines, ce Québécois chevronné est le fondateur de l’entreprise Swissnova située en Suisse. Il possède une quantité d’outils pour mieux évaluer le profil, les forces et les motivations de chacun. Jasmine se prête à sa méthode. Elle découvre les trésors enfouis en elle. Elle possède à la fois les traits de son père et de sa mère sous plusieurs aspects. Avec Guy, elle partage cette facette « femme de terrain » ainsi que les besoins communs « d’aider les autres, de faire la différence et d’offrir une contribution originale dans le monde ». Avec sa mère, elle entretient une propension réciproque pour « l’imagination, une soif d’indépendance, de vie bohème et un sens artistique ».
À la lumière de ces conclusions, la clarté se fait sur qui elle est et par la même occasion sur ce qu’elle doit faire. Aujourd’hui, Jasmine se remémore ce processus avec reconnaissance. Elle déclare que « cela sauve du temps en début de parcours ». Cette expérience lui prouve la valeur du coaching professionnel et des outils psychométriques. Elle se concentre sur sa future œuvre de « créativité utile ». Elle reprend les rênes de l’entreprise de son père Guy, Swissnova. Néanmoins, Jasmine change le nom et le lieu de l’entreprise pour repartir à neuf. Elle décide ainsi de quitter la Suisse et de déménager au Québec, pour elle « une terre de liberté, où tout est à faire ».
Elle se lance dans cette aventure de Nova Global avec le sentiment d’une grande effervescence créative et l’impression enfin de partir « créer quelque chose d’utile » à la mesure de son potentiel et de ses propres aspirations.
La créativité utile se met en œuvre
Une fois arrivée au Québec, en plus de renégocier les droits pour l’international, Jasmine se consacre à renouveler et à réadapter entièrement les outils utilisés par Guy. Pour ce faire, elle consulte tous les outils psychométriques disponibles. Jasmine veut recueillir le meilleur de chacun. Elle approche donc des spécialistes des outils psychométriques. Elle pèse les pours et les contres ; effectue des tests ; fouille les informations ; évalue les qualités et les défauts ; revois les paramètres ; expérimente et théorise ; analyse et synthétise encore et encore ; concrétise et peaufine jusqu’à avoir épuisé tous les modèles. Il en résulte le Profil Nova, un profil de personnalité accessible, adapté au monde entrepreneurial, élégant, précis et à la fine pointe de la recherche. Jasmine détient l’instrument nécessaire pour prospecter le tempérament, les forces et les motivations profondes de sa clientèle comme jamais auparavant. Son travail fait mouche. La demande s’accroît; son temps libre diminue. Victime de son succès, elle se retrouve avec un agenda surchargé. En bonne battante, Jasmine envisage aussitôt des solutions : former de nouveaux coachs aux outils et engager des employés pour des postes à teneurs logistiques.
L’essence du leader, créer une culture
Jasmine connait intimement la difficulté des entrepreneurs à s’ajuster à cette nouvelle réalité. Elle surgit en période de forte croissance, c’est l’étape où il faut « apprendre à lâcher prise et déléguer ». Dans l’objectif de contourner divers obstacles caractéristiques de cette situation, Jasmine a choisi de commencer par la base. Avant d’embaucher quelqu’un, Jasmine préconise de se poser une question essentielle : « Qu’est-ce qui te parle dans ton leadership? ». Par-là, elle recommande de définir en premier lieu ses valeurs et son style. Quant à elle, la question du style vient toucher à l’ambiance du milieu de travail et à la qualité des relations au cœur de celui-ci. Le style, c’est la manière de transmettre ses valeurs. Le plus infime geste et la plus subtile inflexion dans la parole, rien n’échappe à cette représentation des valeurs qu’un leader offre à ses employés. Il est donc primordial de savoir, où on se situe à ce propos avant de recruter ou de donner des consignes.
« Comment je fais vivre mes valeurs au sein de mon entreprise? »
D’ailleurs, selon Jasmine, une seconde question en découle : « Comment je fais vivre mes valeurs au sein de mon entreprise? ». Les leaders ont la responsabilité de faire « vivre leur culture à l’interne, concrètement ». Ça se traduit d’abord par des critères d’embauche. Au-dessus du savoir-faire, de l’expérience et des diplômes, Jasmine inscrit l’alignement avec les valeurs de Nova Global en haut de la liste. L’atmosphère et l’efficacité sur le terrain sont d’abord conditionnées par des gens en phase avec la mission d’entreprise. Jasmine constate la force de sa culture à l’interne et la cohésion avec son personnel, quand elle « passe de 2 à 13 employés à une vitesse fulgurante ». Après un certain moment, Jasmine n’a plus le temps de former tout le monde et de connaître tous ses clients. Pourtant, l’art du coaching s’inscrit tellement profondément dans l’ADN de son entreprise, que les employés en viennent à se former naturellement entre eux. Ils sont à ce point épris de développement personnel et de coaching, qu’ils affichent une passion et une motivation envers les clients similaires à celles de Jasmine. Cela permet de fidéliser sa clientèle avec l’entièreté de son personnel.
Avec cette vision, Jasmine illustre l’adage : « Travail pour ta culture et ta culture travaillera pour toi. ».
La puissance du leadership authentique
Jasmine s’inquiète d’un mythe ou plutôt Jasmine veut faire différemment pour aller au-delà de ce mythe. Cette image d’Épinal auquel elle pense, c’est celle du chef d’entreprise invincible, sans reproche et sans peur. Jasmine y voit un masque fictif pour couvrir des insécurités réelles. Pour elle, cette force apparente révèle une faiblesse dissimulée. À ce leader parfait et inflexible, elle oppose un leader imparfait et flexible; elle préfère l’authenticité au mensonge. Jasmine propose d’enlever les masques au profit d’« un leadership vrai et vulnérable ».
« Montrer ses faiblesses démontre sa force. »
Sa conviction : « montrer ses faiblesses démontre sa force ». Par exemple, avouer que « son chemin n’est pas toujours le meilleur » ouvre le dialogue pour une meilleure collaboration. Cela permet de se tenir loin du piège de son ego et d’accueillir la critique. Se rappeler « l’impossibilité de tout faire tout seul », arme un leader d’une grande humilité que Jasmine révèle viser à long terme. Cette humilité se présente comme la clé de voûte d’une riche communication entre son équipe et soi. « Parler avec transparence » cimente non seulement la crédibilité du leader, mais exhorte également les autres à en faire autant « pour se poser les bonnes questions ». « Les accrochages sont inévitables comme dans toutes les relations », mais avoir en tête qu’« on bâtit tous ensemble » élève la conversation vers des solutions. Cela développe le courage de groupe nécessaire pour « nommer les choses au fur et à mesure » afin d’agir rapidement.
Une fois encore, au contraire du cliché de l’homme d’affaires bourrin et sans pitié, Jasmine affirme qu’il faut « beaucoup de compassion » pour réussir en affaires. Le mot « compassion » provient du latin compassio « souffrir avec », il nous ramène à l’exercice éthique de se mettre à la place de l’autre. Cette qualité du leader élargit sa vision. Par la compassion, le chef d’entreprise valorise et manifeste de la reconnaissance envers son équipe, ce qui favorise la rétention de ses éléments. Devant une situation délicate, le leader se tourne vers la compréhension plutôt que le jugement. À cela, s’ajoute une confiance plus vive entre le leader et son équipe. Pour Jasmine, donner un mandat limpide à ses intervenants, les rendre imputables et aligner leur rôle par rapport à la mission de l’entreprise permet de « déléguer dans une bonne énergie ».
L’importance d’avoir un coach
Il va sans dire que Jasmine croit au coaching, la puissance d’une perspective différente et experte. Comme tout le monde, elle ne pense pas être au-dessus de celui-ci. À cet effet, Jasmine recommande aux entrepreneurs de recourir à un œil extérieur. En plein tumulte de sa croissance, Jasmine désire « enligner sa business » et constate des aspects à améliorer afin d’atteindre une certaine pérennité. Dans un soin constant de perfectibilité, elle fait appel aux services d’une coach en affaires dans l’optique d’évaluer et de redéfinir ses objectifs entrepreneuriaux. Il n’est pas évident de bien s’analyser seul et de s’octroyer la permission de prendre du recul.
Durant ce coaching d’affaires, la coach accompagne Jasmine dans un recentrement de ses « réelles priorités ». À l’aide de judicieux conseils, elle conçoit alors effectuer quelques pas en arrière, ralentir et « faire ce qu’elle n’aime pas pendant trois jours » : une planification stratégique. Elle acquiert la discipline « de s’assoir et de mettre ça par écrit ». Jasmine qualifie cette étape de « mal nécessaire ». Elle sort ainsi de l’émotion immédiate du terrain pour acquérir une vision d’ensemble. Le dialogue avec la coach conduit Jasmine « à se poser les bonnes questions », à concevoir un budget précis, et un tableau de bord. Jasmine retourne dans l’action et « navigue en ordre » grâce à cette structure solide.
Pourquoi, la question ultime et la force d’une entreprise
Quand l’obscurité s’abat sur l’avenir de nos efforts, que notre équipe présente une mine déconfite et que les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous, Jasmine puise son inspiration dans son « trésor intérieur », cette précieuse formule de l’Alchimiste. Ce trésor brille dans la vocation du Profil Nova, « aider les gens à découvrir que leur manière de faire et d’être est différente et que le monde peut devenir un endroit meilleur grâce à ça ». « Le pourquoi d’une entreprise », sa mission « semble encore plus grande quand ça va mal », déclare Jasmine avec un ton réconfortant. La voix maintenant combative, Jasmine énonce « il ne faut jamais, jamais lâcher ce pourquoi ». Selon elle, la résilience et la persévérance sont le socle de toutes entreprises humaines. Jasmine y est sensible. En fait, Jasmine confit que « d’incarner ce que j’enseigne et de n’avoir aujourd’hui plus de masque » confirme qu’elle a bien fait d’accorder sa confiance à son intuition et aux « indices que la vie place sur notre chemin » pour évoquer encore Paulo Coelho.
Jasmine compte à ce jour « environ 100 000 Profils Nova d’enregistrés, une réalisation bien concrète et seulement un début ». À l’égard de son entreprise, elle se dit surtout fière de la qualité de son entourage. Elle parle de son équipe comme d’une « famille avec un sentiment profond d’appartenance et de communauté dont la qualité des relations n’a pas de prix ». Lorsqu’on l’interroge sur ses projets futurs, une lueur contemplative dans les yeux, Jasmine Bélanger murmure presque cette phrase pour elle-même : « Continuer de fleurir et de m’épanouir en cohérence avec moi-même, riche de ma création ».
Rédaction : Jean-Philippe Nadeau Marcoux
Comments